Telle une ombre
gravée dans la poussière
création 2003
Chorégraphie, scénographie et lumières : Faustin Linyekula
Interprètes : Cathy Ematchoua, Julien Kokou, Fabrice Ladrana, Anne
Nguyen, Alexandra Raduszynski, Premagopal Santhanagopal
Musique : Joachim Montessuis
Costumes : Bezem Kassan
Durée : 23 minutes
Création : Théâtre Jean Vilar - Suresnes dans le cadre de Suresnes Cité Danse
du 11 au 19 janvier 2003.
« La route, le voyage, les rencontres, c’est un peu ça le
théâtre. C’est passer un moment ensemble. Non seulement
le passer ensemble sur scène, avec les partenaires, mais aussi avec
le public. Au fond, si je fais du théâtre, c’est pour ne
pas être seul. Ou pour l’être un peu moins. Alors, cette
pièce, c’est ça : on s’arrête un moment et
on demande: qu'est-ce qu'on peut faire ensemble ? Qu’est-ce qu'on peut
se dire ? Le respect que j’ai du public, il est dans ce fait que j’ai
besoin de lui. Le public n’est pas obligé de venir, pas obligé
de s'arrêter pour voir. Ce n’est pas lui qui m’a demandé
de venir, c’est moi qui l’ai invité. Il se trouve que j’ai
à lui parler.
L’idée de la pièce est partie de ça, précisément,
de la route, du voyage, des rencontres. Comment se parler, comment se quitter.
Je suis parti d'un tout petit dialogue entre deux personnages. Du texte avec
de la danse, ça ne m'a jamais gêné, au contraire. Alors
il y a deux répliques, trois fois rien, deux petites phrases anodines,
de celles qu'on dit sur la route, on se rencontre, on fait un bout de chemin
ensemble, même si on n'est pas pareil. Parce que dans ces deux répliques,
tout de suite, il y a un contraste : ces gens ne parlent pas le même
langage. Ils n’utilisent pas le même ton. Chez le premier, la
langue est facile, la phrase est ample. Chez l'autre, c’est sec, violent,
cassé. Mais c’est peut-être ce dernier, qu’on devine
désarmé comme Ophélie avant de mourir, qui va nous étonner.
Parce que le problème de la rencontre, de la route, du voyage, c’est
aussi qu’il faut apprendre à se dire au revoir.
Pour moi, chaque pièce réclame sa technique propre. Celle-ci,
conçue pour six interprètes, repose sur certains des principes
de la “danse contact” et “release” telles qu'on les
enseignait dans les années 60 et 70. La pièce dure vingt trois
minutes. Juste assez pour voir les corps respirer, l’organique, le sensuel.
Juste bien pour ne rien céder de mon côté… sentimental. »
Faustin Linyekula